dimanche 4 août 2013

Réflexions autour de L'Inconnu du lac d'Alain Guiraudie (2013)




 « Car il y a la règle, et il y a l'exception. Il y a la culture, qui est de la règle, et il y a l'exception, qui est de l'art. Tous disent la règle, ordinateurs, T-shirts, télévision, personne ne dit l'exception, cela ne se dit pas. Cela s'écrit, Flaubert, Dostoïevski, cela se compose Gershwin, Mozart, cela se peint, Cézanne, Vermeer, cela s'enregistre, Antonioni, Vigo. » (Godard dans J-L G / J-L G cité par Alain Bergala dans L'hypothèse cinéma, p. 30). Et Guiraudie pourrait-on ajouter. Car L'Inconnu du lac est une exception et m'est apparu comme une oasis au milieu d'un cinéma français asséché.

A l'heure où vient d'être signé l'extension de la convention collective pour la production cinématographique (le texte ici) dont Guiraudie est un des seuls défenseurs, il a beaucoup été question de préserver la « diversité » du cinéma français et « l'exception culturelle française » qui est en fait de la règle et n'a d'exceptionnel que son nom. Car cette diversité que défendent tant les opposants à la convention collective est malheureusement une diversité de principe, qui propose un paysage cinématographique à choix fermé (ou bien... ou bien...) : on se retrouve finalement coincé entre les films à gros budgets (financés par l'aide automatique du CNC) et les films dits « d'Auteur » avec une préférence pour les sujets sociaux (financés en grande partie par l'aide sélective du CNC). Si l'intention est louable, les effets en sont redoutablement pervers puisque c'est le financement des films qui entraîne le choix des films produits plus que l'inverse, et il y a fort à parier que l'exception est souvent laissée au bord du chemin parce qu'elle ne rentrait pas dans les critères d'attribution, ne se conformait pas à la règle justement.

Lacan disait qu'avoir un avenir assuré, c'est ne pas en avoir et j'ai justement l'impression que le cinéma français, à force de vouloir assurer la subsistance de « l'exception culturelle française » (et à chacun sa part du gâteau) a finalement produit des films en grand nombre mais de plus en plus pauvres et uniformes. Il ne s'agit pas de mettre en péril la production française mais j'ai tout de même le sentiment qu'il faut que quelque chose bouge (un vieux rêve sans doute) pour que le cinéma français retrouve un peu de vitalité. Alors, on parle de diversité et il y a même une aide au CNC pour cela, ce qui me fait dire que cette diversité est en réalité déjà perdue puisqu'il faut qu'on la paye en retour. Il y a quand même quelque chose de très ironique dans le fait que les gens de cinéma parlent sans cesse de diversité alors qu'il s'agit du milieu le plus fermé qui soit, qu'il faut sans cesse être coopté, « connaître quelqu'un », même pour un petit poste. Cela dit, je n'ai rien au départ contre ce type de recrutement ; j'aime bien cette idée au contraire d'embaucher « n'importe qui », quelqu'un qui n'est pas forcément « formé pour » mais finalement c'est l'inverse qui se produit, le cinéma est devenu très élitaire et ferme ses portes aux inconnus. Cette logique d'inclusion est devenue une logique d'exclusion. On m'a d'ailleurs récemment refusé une formation à l'INA dans le cadre de la formation professionnelle parce que je ne connaissais ni producteurs ni réalisateurs pouvant me faire travailler à l'issue de la formation, c'est-à-dire qu'il fallait avoir un job assuré avant même d'avoir les capacités de s'assurer cette vie sans avenir.

Peut-être que cela pas grand chose à voir avec le film à proprement parler mais je trouve qu'on parle beaucoup des films finis d'un côté et de leur condition de fabrication de l'autre comme s'il n'y avait pas de rapports entre eux alors qu'il est évident que l'un détermine en grande partie l'autre. En voyant L'Inconnu du lac, je me suis demandé pourquoi ce film qui a priori est très loin de ma vie quotidienne me parlait bien plus (à moi et étrangement aussi de moi) qu'un film qui se passait dans une cité en banlieue parisienne qui est pourtant le décor de ma vie. Ce qui est en cause ce n'est pas tellement le choix du sujet, c'est plutôt cette façon de ne jamais sortir de la dichotomie moi/les autres qui plombe le cinéma français. Il y a énormément de films français (mais pas seulement) qui ne reposent que sur le principe d'opposer le personnage principal qui est censé être différent, avec une vraie sensibilité, marginal (et que sais-je encore) contre les autres qui ne seraient que les représentants d'une normalité monstrueuse et castratrice. En ce sens, on a troqué l'intimisme et les pensées intérieures de la littérature du 19ème siècle contre un égocentrisme complaisant et sans intérêt, un « moi je » narcissique qui n'intéressera qu'un public qui s'y retrouverait en miroir. C'est cette façon de ne s'intéresser qu'à soi qui fait que dès qu'un film parle « de l'autre », c'est souvent sous la forme abjecte « des autres » (les pauvres, les sans-papiers et les prostituées, la plèbe en somme) qui n'existeraient pas en tant que tels mais seulement en tant que représentants de leur (sous-)classe et ne gagneraient leurs droits à l'image qu'en tant qu'ils nous permettent de s'affranchir de notre angoisse (le retour du refoulé) et de s'acheter en sus une bonne conscience.
 
Il y a quelque chose de fondamentalement différent dans L'Inconnu du lac même si ce n'est pas les films qui tournent autour de l'homosexualité qui manquent. C'est même un sujet plutôt à la mode en ce qu'il est susceptible de concentrer tous les poncifs du cinéma français puisqu'il permet de faire d'une pierre deux coups en donnant une caractérisation forte au personnage comme étant différent des « autres » et de se faire le porte-drapeau d'une minorité. Rien de tout cela dans L'Inconnu du lac, car ce n'est pas un film sur c'est un film avec et cela change tout (c'est la distinction que faisait Daney entre un documentaire et un document*). En voyant ce film je me suis dit que ce n'était pas possible de faire un film sur des minorités (mais avec oui) parce qu'au lieu de lutter contre la marginalisation, cela visait au contraire à la reconduire et souvent à se complaire à la victimisation. Guiraudie à une façon très simple de faire des films avec les gens plutôt que sur ou contre et c'est ce qui détermine le fait qu'il s'agit de films populaires plus que l'origine sociale d'un auteur ou du sujet qu'on filme. Si dans Un vieux rêve qui bouge (2001), il y a effectivement un milieu social marqué, ce n'est pas le cas dans L'Inconnu du lac où celui-ci est flottant et peu défini puisque tout le monde est à poil sur une plage. Par contre, ce qui est intéressant c'est que même dans ces conditions, Guiraudie montre bien que les hommes sont prompts à recréer des frontières et que le désir, cet inconnu, est à la fois ce qui nous sépare et nous unit.

Voilà, je ne vais pas faire la critique du film même si c'est le plus beau film que j'ai vu en salle cette année, parce que d'autres s'en sont déjà chargés et l'ont bien fait (voir la critique de Jerôme Momcilovic sur Chronicart, ici). Je voulais juste ajouter qu'entre autres exceptions, c'est aussi la première fois qu'il y a des scènes de sexes non simulées qui soient du cinéma, là où auparavant je n'ai jamais vu que des postures d'auteurs et des « vignettes pornographiques » (selon les mots de Guiraudie) comme si le sexe ne pouvait avoir une autre image que celle fournie par le cinéma porno. Guiraudie montre au contraire qu'il y a une complète homogénéité entre le sexe et les rapports amoureux où bien souvent ici l'acte précède la conversation. Finalement c'est un beau film d'amour dont le message, s'il en est un, pourrait être celui-ci : il n'y a pas d'amour sans risque. Le cinéma français ferait bien d'en prendre de la graine.


Sara Ri






* « Un document informe sur l'état de la matière filmée ou à filmer et sur l'état du corps filmant. L'un avec l'autre. Deux pôles d'une seule opération. Un bon document est un branchement réussi. Tout bon film, en ce sens est un document » (Serge Daney, La Maison cinéma et le monde, T2, p.90)

mercredi 31 juillet 2013

Le complexe du super-héros


 Iron Man 3 de Shane Black, 2013



La Mythologie comme scénario

Iron Man 3 me confirme à quel point l'avènement de Marvel à Hollywood est ce qui pouvait arriver de mieux à cette industrie de plus en plus moribonde. Il faut se faire une raison : il n'y a plus de place pour les auteurs là-bas, ils s'y sont tous fait dézinguer les uns après les autres. On va me dire qu'il y a encore des singularités dans ce cinéma, des signatures, des styles. C'est vrai, mais ce ne sont que les signes de l'auteurisme, une mise à profit du maniérisme formel pour mieux pallier à l'absence de discours, des moulinets dans le vent... Alors, quand un cinéma n'a plus rien à dire et plus personne pour parler, il ne lui reste qu'une voie de salut : la mythologie, dont la particularité est d'être autonome, d'être sa propre source d'inspiration, de contenir sa propre morale. Marvel est l'un de ces pourvoyeurs de Mythologie (comme le fut Disney, qui a racheté Marvel et Lucasfilm, autre machine à créer du Mythe, comme par hasard). Son univers a été entretenu dans un souci d’homogénéité et de cohérence, les personnages y cohabitent sans anomalie, suivant inlassablement la ligne de conduite qu'on leur a défini. En ce sens, Marvel est très proche de Disney : on ne verra jamais Mickey flinguer des zombies au bazooka comme on ne verra jamais Spider-man gagner de l'argent en bourse. C'est la grande différence avec DC Comics dont les personnages (Superman, Batman, Flash etc.) ont été créés indépendamment les uns des autres puis réunis sous la même bannière après diverses acquisitions commerciales et tarabiscotages scénaristiques, où chacun y est allé de son petit grain de sel. D'où un univers plus boiteux mais propice à la réinterprétation. On peut refaire Batman à toutes les sauces : pulp, kitsch, gay, gothique, cartoon etc. Spider-man, lui, reste le même quoiqu'il arrive. Comparez les reboots de Batman et Spider-man. Dans le premier cas, entre le film de Burton (Batman, 1989) et celui de Nolan (Batman Begins, 2005), vous avez deux visions distinctes d'un même mythe, aussi différentes que le jour et la nuit. Dans le second, le film de Marc Webb (The Amazing Spider-man, 2012) ressemble à un remake chichiteux et mou du film de Sam Raimi (Spider-man, 2001), tous deux très proches du comic book, ne s'éloignant pas des fondements du mythe. Bref.

Tout ça pour dire que la force de la saga Iron Man provient de ce qu'elle puise et exacerbe dans le riche matériau de base. Si bien que même Jon Favreau, acteur sympathique mais réalisateur limité et sans intérêt, est soudain capable de réaliser parmi les meilleurs blockbusters du moment. Ôtez lui cette mythologie et il retombe totalement à plat (Cow-boy vs Envahisseurs). Et le contrôle du studio Marvel sur ses franchises n'y est pas étranger. Sa gestion consiste à veiller à ce que leurs héros soient développés selon leurs caractéristiques propres et éviter les traitements paresseux du type Green Lantern (Martin Campbell, 2011) ou les Fantastic Four (Tim Story, 2005 et 2007), qui commettent l'erreur de considérer le super-héros avant tout comme un super-pouvoir, de ne les résumer qu'à ça. En l'occurrence, l'histoire de Iron Man n'est pas simplement celle d'un homme en armure hi-tech qui dézingue des terroristes, mais celle d'un enfant pourri-gâté et génie industriel surdoué dont le pire ennemi n'est autre que lui-même. Le cynisme de Tony Stark cache son angoisse profonde d'affronter une réalité qu'il fuit par tous les moyens : le luxe, la frime, l'alcool, les filles et - surtout - son armure. En ce sens, Stark, mélange entre Howard Hugues et Thomas Edison, renvoie l'Amérique industrielle à son protectionnisme et au comportement autodestructeur qu'induit le repli sur soi. Dans The Avengers, poussé par ses compères superhéroïques, Stark fait l'expérience de l'héroïsme, c'est-à-dire du dépassement et du sacrifice (en pénétrant un vortex). L'idée géniale de Iron Man 3 c'est de prendre en compte ce début d'évolution et d'en faire un essai pas totalement transformé. Le vortex, soit un trou (donc un manque), a mis à nu l'angoisse de Stark, qui se manifeste ici sous forme de crises de panique. Il ne dort plus et se réfugie maladivement dans sa passion : son armure, dont il a créée pas moins de 45 modèles ! C'est dans cette posture obsessionnelle et une certaine fragilité que les conséquences de son cynisme lui reviennent en pleine poire  : un scientifique qu'il a humilié une décennie auparavant, associé à un super-terroriste, a mis au point une formule qui créé des surhommes capables d'affronter à mains nues l'armure d'Iron Man.


Je suis Tony Stark

Dans chaque épisode, Stark a dû affronter un double de lui-même, qu'il soit négatif (Ivan Vanko) désublimé (Justin Hammer) ou idéalisé (Obadiah Stane). On voit là ce qui fait à la fois l'intérêt mais aussi la limite de la saga : tout tourne autour de Tony Stark, tout nous renvoie à lui - là où les Batman de Nolan (réalisateur peu doué pour le symbolique) avaient l'immense mérite de (tenter de) faire exister tous les personnages (même si télévisuellement plutôt qu'esthétiquement, c'est-à-dire par le biais du scénario et en allongeant la durée du film), et d'inscrire Bruce Wayne dans un monde sur lequel il influe mais dont il n'est pas le centre de gravité. Mais l'altérité dans l'univers de Stark est introduite, de fait, dans The Avengers, et se prolonge dans ce troisième film puisque, séparé de son armure - seul rempart contre le monde - il doit, comble de sa phobie, composer avec les autres, se frotter à un peu d'aliénation et se confronter à leur désir : celui de voir en lui un héros (le jeune Harley), un patriote (Rhodes) ou un mari (Pepper). Défi complexe qui l'oblige à contenir ses pulsions : lors d'une scène au début du film, tandis qu'il rêve du vortex dans un sommeil agité, sa femme tente de l'apaiser quand elle se fait agresser par l'armure. Censée protéger Stark contre ce qui pourrait lui nuire, l'armure s'indexe sur son inconscient, s'en prenant à ce qui lui fait peur tout en le révélant, ici Pepper. C'est là que se situe l'enjeu du film : accepter l'autre, comprendre qu'il faut aussi composer avec lui, faire de la faiblesse que provoque nos sentiments, une force. Enjeu un peu bébête mais qui peut donner naissance, en plein fatras spectaculaire, à des passages assez beaux. En plein assaut terroriste dans sa demeure, il fait revêtir à Pepper son armure pour la protéger avant que, ainsi parée, elle ne le protège à son tour, extériorisant son image du moi (l'armure), l'obligeant à lui faire face. « Je suis Iron Man » claironne-t-il depuis le premier film, mais Iron Man, prend-il conscience, n'est pas nécessairement « moi ». C'est ce qu'il doit admettre dans ce film-ci. Son armure y est brinquebalante, déchargée, instable, vole en morceau. Il y est de moins en moins à l'aise (voir la scène où il tente de descendre des escaliers sans se vautrer). Sa vision idéalisée de lui-même s'effrite. Dans un final extraordinaire, Stark passe d'armure en armure qui se détruisent toutes les unes après les autres, jusqu'à leur explosion totale sous forme de feu d'artifice (bouquet final qu'il offre à Pepper). Définitivement débarrassé de l'armure, il est sans ressource et n'est donc plus le vecteur de la fiction. Il est alors prêt, l'histoire ne dépendant plus de lui, à accueillir le Deus Ex Machina qui l'affranchit d'Iron Man : Pepper le sauve in-extremis une fois de plus mais sans armure cette fois-ci. En observant lors d'un plan touchant le casque fissuré d'Iron-man, Stark constate ce qu'il a toujours tenté de dissimuler, à lui et au monde : sa vulnérabilité. Ses failles le définissent et à travers elles, il se trouve enfin. Un super-héros n'existe cinématographiquement que dans ses paradoxes.

Je ne voudrait pas minimiser l'apport de Shane Black, dont il a été peu question jusqu'ici, sur la réussite du film. L'humour à contre-courant, les punchlines percutantes, le récit très orienté pulp, et la thématique du subterfuge qui conduit toute l'intrigue (le traitement aussi génial que profane du Mandarin) : tout cela, il est évident qu'on le lui doit. Mais j'aurai du mal, malgré tout, à y voir un quelconque travail d'auteur, voire même d'artisan. C'est, comme Wehdon, Nolan et les autres, un entertainer doué, un chimiste méticuleux qui sait manier les ingrédients de l'histoire. Le filmage reste sommaire, les relations entre les personnages patinent parfois, certaines articulations du récit sont maladroites et le jeu de Downey Jr. est de plus en plus schématique. C'est le prix à payer de ses fictions « autonomes », de ce cinéma sans cinéaste : ce qu'il gagne en efficacité narrative et en richesse psychologique, il le perd en personnalité. Hollywood, avec ce nouveau genre qu'est le film de Super-héros et qui l'a fait définitivement basculer du côté de la Mythologie, fonctionne de la même façon que la télévision et ses séries, où un projet correctement mis sur les rails décolle de lui-même, emportant tout le monde dans son emballement : comédiens, réalisateurs, scénaristes... Il faut s'en contenter. À une époque où le cinéma hollywoodien, tout style confondu, est de plus en plus inconsistant, le film de Super-héros a un mérite immense : celui de replacer l'humain au centre de ses récits pyrotechniques*. Parce qu'il ne peut, dans le fond, raconter qu'une seule histoire : celle d'un homme face à ses névroses.

Matthieu Santelli



À l'opposé, par exemple, de Pacific Rim, film considéré « d'auteur » par certains, où l'humain y est plus encombrant qu'autre chose

vendredi 31 mai 2013

Tom Dicillo, un vrai cinéaste.




Il s'en est fallu de peu pour que l'on passe à côté de Delirious : c'était en 2007 et le nom de Dicillo m'était vaguement familier, appartenant à l'époque au nombre des cinéastes dont je n'avais vu aucun film tout en en ayant « entendu parler » (Ca tourne à Manhattan, 1994 -image d'illustration- est son film le plus connu). Il faut dire que dans l'agenda des sorties, il y a toujours eu une nette distinction entre les films « dont on parle » et ceux dont on ne parle pas ou peu et cela même si le film a bénéficié d'une « bonne critique » (ce qui fut le cas de Delirious). On peut toujours penser que le spectateur a « quand même » le choix mais les dés sont souvent pipés : entre deux films qui ont pour moi le même intérêt potentiel, je me suis rendu compte que je finissais toujours par privilégier celui «dont on parle » justement pour pouvoir en parler avec d'autres comme s'il garantissait en quelque sorte un lien social dont un bon film « dont on ne parle pas » m'aurait privé.

Delirious a donc été vu dans un contexte un peu particulier : ayant réalisé avec dépit que mon désir aussi était aliéné (!), j'ai voulu changer la donne en livrant « presque » tout à fait au hasard le choix du film. Bien que cela soit impossible (il y a Steve Buscemi et Michael Pitt dans le film, acteurs qui ne m'étaient pas inconnus), je ne pense pas que j'aurais vu ce film sans cette idée. J'eus la main heureuse cette fois-ci mais ce fut la seule et ces séances hasardeuses furent très vite abandonnées, constatant avec regret que les films « dont on ne parle pas » le sont souvent à raison. Cela dit, il ne servirait à rien non plus de rager sur le fait que Delirious, qui est vraiment un très beau film, soit plutôt passé inaperçu : en réalité Dicillo ne peut s'en prendre qu'à lui-même car en voyant le film il est évident qu'il refuse de jouer le jeu, ou alors il le joue mais à sa façon et d'une façon vraiment très personnelle. Ce jeu, c'est celui, très ancien, du spectacle et de son mythe (avec ses stars, ses agents de « com » et ses codes). Ce qui forme d'ailleurs son sujet : dans Delirious, Toby ,un sans-abri, devient une star, son passé de sans-abri devenant une preuve d'authenticité utilisée à des fins publicitaires. Film-star il ne pouvait donc pas l'être en ce qu'il ne vise pas à l'édification de son propre mythe. Cela ne veut pas dire que les films-stars sont nécessairement mauvais (ils ont au contraire des « qualités propres aux stars » comme le dit l'agent de Toby) mais il est aussi évident que les films qui ne jouent pas le jeu (de vendre leur image en plus de la produire) sont souvent frappés d'ostracisme.

C'est aussi en cela que Dicillo est un véritable héritier de la série B -non pas en ce qu'il recycle à son compte de mauvais scénarios- les siens sont au contraire remarquablement bien écrits -mais en ce qu'il ne cherche pas à faire des films édifiants (comme les récents Lincoln et Django Unchained) ni bêtifiants ce dont Dicillo n'hésite pas à se moquer en les parodiant : un film indé dans Ca tourne à Manhattan et sa séquence de rêve (avec un nain et une pomme !), un clip avec une danse presque pornographique dans Delirious ou encore un soap particulièrement gratiné dans Une Vraie blonde (1998). Parodie à vrai dire n'est pas le mot juste car il se contente simplement de reproduire (c'est à peine exagéré et parfois même en deçà de la réalité) ce qui est tous les jours livré sur nos écrans : il en montre simplement l'absurdité en n'épousant pas leurs codes et en se détachant du mythe qu'ils prétendent instituer. Cela n'est pas chose facile car si « la langue pense et poétise à notre place » comme le dit Klemperer, il ne sert à rien d'en ignorer les termes ni d'essayer de les prendre à revers (façon Stillman) puisque l'inverse d'un cliché nous y emprisonne tout aussi bien (c'est pair ou impair). Dicillo au contraire n'hésite pas à affronter les clichés, à les travailler et à s'en moquer avec une joie un peu vacharde sans mépris ni pitié (qui est une forme de mépris inversé). Et c'est aussi la quête de ses personnages qui sont pris dans des clichés malgré eux : dans Box of moonlight (1996), Al Fountain ne peut se dépêtrer de sa vie de petit chef monomaniaque, vie à laquelle il n'a jamais aspiré mais contre laquelle il ne s'est jamais révolté non plus.

Mais il ne s'agit en aucune façon d'un absolu vers lequel le personnage se doit d'aller comme si le film n'était que la preuve en images d'un dogme qui lui préexiste et auquel le spectateur devait se plier. Dicillo instaure au contraire une certaine distance qui fait que le personnage principal n'est pas le point de vue sur lequel le spectateur est obligé de s'aligner car la vérité que trouvent ses personnages, s'ils la trouvent, est une vérité pour eux (intersubjective dirait Lacan) et pas la même pour tous. En ce sens, la fin de ses film est toujours un peu « déceptive » car il n'y a pas de conclusion finale où nous communierions tous pour la même grande cause, ni quelqu'un qui viendrait in fine nous indiquer la route à suivre ni que penser, ce qui est semble être devenu le schéma type de la comédie américaine (notamment chez Apatow). Et si on ne s'identifie pas à un seul personnage, c'est qu'on peut en revanche s'identifier à chacun, et même à un personnage secondaire : c'est ce qui donne l'impression très forte de vie dans les films de Dicillo où chacun existe en dehors même de la direction où nous entraîne la fiction. Il y a quelque chose de très démocratique dans le fait que les personnages ne font pas nécessairement ce qu'on attend d'eux cinématographiquement parlant : en règle générale, les bodybuilders bodybuildent et les figurants figurent pendant que seuls les personnages principaux peuvent aspirer à être quelque chose en plus, comme si eux seuls avaient gagnés un droit de vivre cinématographique.

Ici il y a l'idée que chacun a la possibilité d'être humain (s'il le souhaite) voire d'être tout simplement ; même une starlette de soap peut soudain faire une déclaration d'amour sincère (Delirious) et il n'est pas rare de voir, au détour d'un mouvement de caméra, un figurant bodybuildé faire passer le temps en jouant avec du sable (Une vraie blonde) sans que cela ne soit immédiatement rentabilisé par la fiction. Cela aussi vient de la série B, cette façon de « dépenser » ses idées sans compter, d'avoir une vraie joie à « faire un plan » et c'est peut-être ce qui manque le plus au cinéma aujourd'hui. Et c'est de cette façon, toute B qu'elle soit que Dicillo arrive à produire une vraie image (chose rare aujourd'hui) qui est arrachée à tous les déterminismes (social ou psychologique) et à tous les clichés (il lui redonne le sens qui avait été galvaudé), où soudain l'autre existe non pas par rapport à ce qu'il est mais par rapport à ce qu'il décide de devenir : c'est précisément le choix de Les Galantine à la fin de Delirious (je ne révèle rien, il faut voir cette fin).

Dicillo fait exactement l'inverse de ce qui est habituellement recommandé dans les manuels pour scénaristes : les comportements des personnages ne découlent pas de la « psycho-typo » des personnages mais c'est au contraire par leurs actes qu'ils s'affirment (en tant que conscience de). C'est pourquoi ses personnages (tous, même les seconds rôles) sont de moins en moins définis au fur et à mesure de l'avancée du film et de plus en plus complexes bien que cela soit aussi une question d'interprétation car il ne s'agit pas de révéler à la fin du film « la vérité vraie » de leur être mais bien plus de montrer une des interprétations possibles de ce qu'ils sont ou plutôt de ce qu'ils veulent être. D'ailleurs les personnages sont soumis à une réinterprétation constante au cours du film en fonction de leurs actes mais aussi en fonction du contexte qui parfois seul suffit à bouleverser l'ordre établi et offre une sorte de seconde chance aux personnages déjà jugés comme c'est le cas de Joe dans Une Vraie blonde, qui, en serveur nul et comédien relégué à faire de la figuration, ressasse inlassablement la même scène d'un film d'une façon un peu pathétique mais une fois sur scène le même texte prend une toute autre dimension et transforme le pathos en émotion.

C'est en cela, je crois, que Dicillo se différencie le plus de cinéastes comme les Coen ou Tarrantino, qui ont tendance à prononcer des jugements définitifs (Burn after reading, 2008), qui se complaisent à montrer la bêtise humaine et qui en font même leur fond de commerce. Même si cela donne parfois de bons films (comme Fargo, 1996, par exemple), il faut aussi dire que cela met le spectateur à une drôle de place : écrasé par des stars qui incarnent des imbéciles qu'il regarde de haut, il est difficile d'établir aujourd'hui, au cinéma comme ailleurs, une relation à l'autre qui ne serait qu'équitable. Or, c'est justement pour moi le travail que doit accomplir un cinéaste et ce que fait Dicillo en ayant une croyance indéfectible en l'autre (en ce qu'il peut devenir), car chaque personnage dans ses films peut faire preuve de dignité, avoir un moment de grandeur, même un personnage a priori bête. Et c'est aussi parce que les films de Dicillo sont vraiment personnels qu'ils n'ont pas besoin d'en étaler les signes avec virtuosité : il ne cherche pas à se différencier à tout prix (en négatif) en se désolidarisant de ses personnages et ne les sacrifie pas sur l'autel de son propre mythe. C'est sa limite morale. En ce sens, Tom Dicillo est un cinéaste, un vrai.

Sara Ri

mardi 16 avril 2013

Passion impossible



Passion de Brian De Palma, 2012


Pendant un moment, on aurait pu croire qu'avec Passion Brian De Palma avait fait son meilleur film depuis Mission To Mars. L'histoire se déroule dans la filiale berlinoise d'une grande boîte de pub américaine. La directrice de cette filiale, la Blonde, ne cache pas son désir trouble pour une de ses jeune cadre dynamique, la Brune qui, elle, couche avec l'amant de la Blonde, lui-même associé financier de la boîte. La Blonde tente d'envoûter la Brune, tout en la doublant sur un projet de campagne publicitaire pour un téléphone/caméra. La Brune tente de la devancer à son tour tout en faisant mine de lui succomber. Cette intrigue de soap-opera prend soudain de l'intérêt quand tous ces désirs torves transparaissent via chaque objet de retransmission visuelle (webcam, téléphone, vidéo surveillance, etc.). Ce qui est lisse et propre en surface devient libidineux et pervers en apparaissant à l'image. Ce qui fonctionnait jusque là dans le film c'était son aspect résolument cheap : mal joué, écrit de travers et filmé comme un téléfilm mais laissant à De Palma un peu d'espace pour mieux jongler avec les perversions tordues et mises à nue des classes huppées (plutôt que de faire mu-muse avec le montage). Ce n'est pas d'une grande profondeur et c'est loin des meilleurs films du réalisateur mais disons qu'on y trouve quelque chose de réjouissant qui m'a rappelé certains films de Paul Verhoeven, ce qui n'est pas si mal compte tenu de la morosité ambiante du cinéma actuel. Un peu de désir chez un cinéaste américain (même dans un film européen), ça nous change de la frigidité ambiante de l'Hollywood des années 2010.

Et puis plouf ! Les lois du récit reprennent le dessus et, de l'étude psychologique cynique, le film bascule dans le thriller pouêt-pouêt. Arrive donc le meurtre de la Blonde pour lequel est inculpée la Brune qui va dès lors tout faire pour s'innocenter. Ce meurtre n'est pas là pour apporter quelque chose à l'histoire mais pour la figer. Plus rien n'évolue soudain dans les désirs, les passions et les relations qui animaient (croyait-on) les personnages qui resteront là où ce point de non-retour scénaristique les a laissés. Pour De Palma, c'est le signal pour se lâcher et déployer toute la virtuosité dont on le sait capable : le filmage plan-plan laisse place à la sur-stylisation : éclairages expressionnistes, travellings interminables, split-screen et compagnie... Ce qu'il y a de symptomatique c'est qu'il faut que la fiction déraille et sorte de l'ordinaire en se retranchant dans des conventions balisées pour que la caméra délire un peu. De Palma tente de compenser le déficit de propos par ses envolées formelles, ne croyant manifestement pas à la modestie de son récit - qui aurait pu pourtant être son meilleur atout. C'est là que se produit un phénomène curieux : la manipulation présente dans les rapports entre les personnages bascule hors de l'écran et s'interpose entre le réalisateur et le spectateur. Les doubles sens, les faux-semblants, les fausses pistes abondent tandis que la réalisation se fait vertigineuse. Sommes nous dans l'esprit de la Brune ? est-ce un cauchemar ? la Blonde est-elle vraiment morte ? On finit par s'en foutre à mesure que l'on comprend que tout cela n'est qu'un prétexte à la digression visuelle.

Ce qu'il y a de navrant, c'est que la surabondance de cadrages obliques doit malgré tout faire sens, ne pas être gratuite, en l'occurrence renvoyer à l'état comateux de la Brune après le meurtre. Mais cet état, apprenons-nous plus tard, n'est qu'un leurre destiné à dissimuler sa culpabilité. En gros, la filmage s'indexe sur la duperie pour nous duper. C'est toute la différence entre De Palma et Welles, Hitchcock où même Kubrick, chez qui le filmage parfois bizarre donnait un indice en préambule - c'est-à-dire avant même que le récit ne débute - sur ce qui traverse les personnages, deux-trois vérités sournoises que ces derniers tentaient de (se) cacher. Leur modernité consistait à se désolidariser des mensonges des protagonistes et à refuser les rails de la fiction pour livrer le film au spectateur par un autre chemin détourné (et révélateur) là où l'académisme de De Palma suit lâchement le programme narratif de son héroïne (sans intérêt). En gros, De Palma, sous ses airs de réalisateur-grand Manitou qui regarde de haut son film et ses héroïnes, se laisse traîner par la mise en scène là où les autres la démantèlent. En fin de compte, la seule chose pour laquelle on pense ici à Hitchcock, c'est Le Grand Alibi et sa façon de tromper le spectateur à travers le bluff d'un des personnages. Hitchcock avait renié ce film pour la malhonnêteté de son procédé. La filiation entre les deux cinéastes - éternel os à ronger pour cinéphile paresseux - a quand même une drôle de tronche.


Matthieu Santelli

mardi 19 février 2013

Notes sur quelques films (1) : « Preuve de la grandeur spielbergienne par l'idée de parfait »



Lincoln de Steven Spielberg, 2013 (voir également la critique de Matthieu Santelli ici)


En réalisant Lincoln, Spielberg suit logiquement la route qu'il avait prise depuis La Couleur pourpre (1985) c'est-à-dire celle des films dont on ne peut nier le sérieux et cela grâce à son grave sujet (ici l'abolition de l'esclavage). De plus en plus, on dirait que Spielberg est passé maître dans l'art de faire des films académiques tout en disséminant pour les critiques et autres hommes supérieurs un quota de signes visibles du cinéma d'Auteur (sa minorité). A la limite, si le film de Ford (Young Mr. Lincoln, 1939) était un film de studio qui cachait un film d'auteur on peut dire que celui de Spielberg (Lincoln) est visiblement un film d'Auteur (un signe) qui cache un vrai film académique (un signe vide). Cela dit, ce film en trompe l'oeil est loin de rapprocher ses deux publics et les renvoient plutôt dos à dos, chacun voyant Lincoln à sa porte, cherchant à se différencier dans sa façon même d'aimer le film. Spielberg réussit ainsi un véritable challenge, il a « commis » le film parfait, qui répondrait à toutes les demandes à la fois dans les détails (en gros plan) mais sans les inscrire dans une vision d'ensemble (la ligne d'horizon) qui ne pourrait les soutenir toutes à la fois.

Mais depuis La Couleur pourpre (sur ce film voir l'article de Daney, La Maison cinéma et le monde, Tome 3), Spielberg a t'il changé ? Serait-il devenu humain, trop humain ? Je dirais plutôt qu'il a grandi. Pas comme on dit d'un enfant qu'il a grandi car il a déjà franchi cette étape depuis longtemps mais au sens de quelqu'un qui chercherait à avoir de la grandeur et qui pour cela marcherait dans les pas des grands hommes moins pour leur rendre hommage il me semble que pour se mesurer à eux c'est-à-dire de les battre sur leur propre terrain (celui de l'humanisme) : Lincoln mais aussi Ford (qui fit aussi son Lincoln), rien de moins.

Cependant, l'humanisme de Spielberg est un humanisme au rabais, moins un idéal à atteindre qu'une façon de bien vouloir s'abaisser au niveau du spectateur, de lui concéder que par certains aspects (ses plus vils : une scène de ménage, des problèmes avec son fils) mais seulement par ses aspects, Lincoln et le spectateur sont bien de la même race (humaine). Je crois que ce que j'aimais avant tout dans le Lincoln de Ford, c'était cette façon de mettre à égalité le personnage et le spectateur, non pas dans ce qu'ils avaient accompli (au passé) mais de ce qu'ils pourraient accomplir (à l'avenir), que nous pouvions aspirer à « être Lincoln », croire en des idéaux, et même (!) accomplir de grandes choses et qu'inversement, le jeune Lincoln pouvait aspirer à une autre place que la sienne, et pourquoi pas à celle d'un spectateur de l'histoire. J'ai toujours eu l'impression en voyant les films de Ford qu'il « filmait pour ce(eux) qu'il filmait », qu'il n'y avait pas d'hétérogénéité fondamentale entre ceux qui étaient filmés et ceux qui les regardaient alors que chez Spielberg, il y a une barrière très nette entre le public et ce qui est représenté (et celui qui fait la représentation : Spielberg lui-même) car l'autre n'est jamais vu comme pouvant être un horizon désirable. Il y a d'ailleurs chez Daniel Day-Lewis, une façon de jouer Lincoln comme s'il était Lincoln, et que ce Lincoln-là n'aspirait à rien d'autre qu'à être lui-même, qu'à inscrire sa propre légende, ce qui est souvent le propre de la performance d'acteur (et aussi la marque de l 'époque : le désir d'être soi...), ce qui donne un Lincoln parfait, c'est-à-dire non-humain.

Le désir de perfection de Spielberg n'est pas nouveau mais on dirait qu'il prend une nouvelle ampleur avec ce sujet et que la figure de Lincoln, qui fut de loin et encore aujourd'hui le plus aimé des Présidents américains est pour Spielberg l'occasion de se montrer « à la hauteur » et d'en prendre tout à la fois. Ce qu'il voit en Lincoln (un homme parfait, un homme grand par opposition au grand public) semble parfaitement renvoyer à la place que Spielberg voudrait avoir (il fait sa Madame Bovary en quelque sorte) et que ce film parfait sur un homme parfait serait enfin la preuve (incontestable) de sa propre grandeur. Mais comme Descartes en son temps dans sa « Preuve de l'existence de Dieu par l'idée de parfait », il semble confondre les causes et les conséquences, et juge les actes sur leurs effets, ce qui correspond bien à ses films qui répondent davantage à une logique de l'effet, qu'à une logique des causes (moins spectaculaire sans doute). La scène où le 13ème amendement est effectivement voté, est d'ailleurs exemplaire de ce point de vue puisqu'il s'échappe très vite du lieu de l'évènement et multiplie les vignettes pour montrer la réception du vote plutôt que le vote lui-même, allant là où l'information est reçue (5 sur 5) comme si la nouvelle ne pouvait prendre de l'ampleur qu'au travers d'un poste de radio, c'est-à-dire en étant relayée par les médias. Même chose lors de la scène de l'assassinat de Lincoln où, l'évènement est habilement escamoté et n'existe qu'au travers des yeux de son fils, qui est utilisé comme réservoir émotionnel (innocent qui plus est) reversé au profit de l'évènement lui-même.

Qu'en dire ? Spielberg est effectivement passé maître en ce qui concerne les « effets » de cinéma et sa folie des grandeurs le mène sans doute à être grand mais certainement pas humain.


Sara Ri